Plutocrates ou non?
Bombardier a été critiqué, en 2017, pour avoir garanti à ses hauts dirigeants des primes de rendement en millions de dollars. Ces dirigeants font partie du 1% qui gagne presqu’autant que les 99% des autres habitants du globe. D’où les inégalités, la pauvreté d’un grand nombre et la colère et la rage de ceux qui ne bénéficient pas de justes salaires ou qui n’ont pas d’emploi, ce qui peut être à l’origine de graves conflits. Voilà qu’un petit nombre d’individus capture une grande part de la richesse mondialement disponible. Comment cela se produit-il ?
Dans les années 80, j’ai obtenu un diplôme en Administration des affaires (MBA). J’ai alors choisi de travailler, comme fonctionnaire, à l’Agence canadienne de développement international (ACDI). J’y ai apprécié, durant 20 ans, mon travail auprès des populations défavorisées en Afrique. Je crois avoir fait la différence pour des centaines d’hommes et de femmes par ma bonne gestion de projets et ainsi, contribué de certaine façon à la paix.
Ce MBA m’aurait permis d’autres choix de carrière. J’imagine le scénario suivant: je n’ai pas le sou, mais avec mon diplôme et des connaissances en finance, j’emprunte quelques milliers de dollars à la banque que j’investis aussitôt en Bourse. Avec un peu de flair et beaucoup de chance, le retour sur mes investissements serait tel qu’avec de brillants collègues en informatique (c’était le tout début de l’informatique) nous aurions pu créer une nouvelle entreprise de communication et d’informatique. Après quelques mois nous la vendons à profit.
Utilisant ma réputation comme bon gestionnaire, prêt à prendre des risques et un important capital en banque, j’achète différentes petites entreprises en difficulté. Je les restructure en congédiant un grand nombre d’employés puis je les revends à profit. Ma réputation de brillant gestionnaire est reconnue, habile à saisir des opportunités d’affaires, générant le plus de profit grâce à la réduction des charges salariales. Sollicité pour siéger sur des conseils d’administration de firmes réputées, mon influence, mon profit, mon pouvoir et mon cercle de connaissances n’aurait fait que grandir.
Après quelques années, avec une imposante fortune personnelle, gagnée grâce à mes efforts, mon flair et de la chance, je me retrouve parmi les gens prestigieux ceux qui constituent le 1%. Je n’ai fait rien d’illégal. J’ai créé beaucoup de richesse pour moi et un peu pour l’ensemble du pays soit en payant le moins possible d’impôts et de taxes. Pourtant, en supprimant des emplois, j’ai favorisé la pauvreté chez plusieurs, ce qui aurait pu être source de conflits.
Alors, où en est la justice sociale condition essentielle pour la paix? On peut avoir des individus très riches, entreprenants, et prêts à prendre des risques et qui investissent cette richesse dans l’économie, par solidarité et souci du bien commun: il s’agirait pour les 1% d’utiliser leur capital, leur pouvoir et connaissances, pour créer de nombreux emplois stables avec des salaires justes et valorisants. Certains de ces riches investissent déjà dans des PME et ainsi permettent à des jeunes de générer à leur tour de la richesse et de nouveaux emplois. Sans la réduction des inégalités, on s’en va à notre perte et à de très sérieux conflits mondiaux.
À mon tour, sans être millionnaires, je me suis impliqué pour combattre les inégalités en utilisant intelligemment mes petits surplus, en temps et argent. C’est une façon pour moi de contribuer à la justice et à la paix en répandent un peu d’amour et d’amitié pour ceux qui en ont besoin.
Par: Yves Morneau, Professionnel de la paix, CPSC, (www.civilianpeaceservice.ca).